Un débat s’est engagé sur X au sujet du manque de créativité des productions triple A, et le directeur de publication de Larian veut en connaître les raisons.
Swen Vincke, le directeur du studio Larian, créateur de Baldur’s Gate 3, ne mâche pas ses mots lorsqu’il s’agit des projets de jeux vidéo menés par les grands éditeurs et s’est déjà exprimé à plusieurs reprises en public contre les pratiques de développement habituelles des grandes entreprises. Trop peu de passion, trop peu de respect, trop d’attention accordée aux souhaits des investisseurs.
Mais d’autres employés de la même entreprise partagent manifestement cette impression. Sur X, la publication du directeur de l’édition de Larian suscite actuellement beaucoup d’attention. Dans un long article, Michael « Cromwelp » Douse y explique pourquoi, à ses yeux, de nombreux grands éditeurs ne sont plus créatifs eux-mêmes, mais espèrent avant tout que les studios indépendants se chargent de ces tâches à leur place.
Une grande partie de l’industrie est depuis si longtemps axée sur les données que, au fil des générations de talents, la capacité (institutionnelle et/ou intellectuelle) à se fier à son instinct est devenue un art perdu. C’est pourquoi les AAA sont de plus en plus fascinés par les indépendants. L’indie n’a pas le… https://t.co/LxZVFrkcj4
— Very AFK (@Cromwelp) 23 août 2025
Un art perdu
Ce message est une réaction à la réponse d’un autre utilisateur qui s’étonne que si peu de jeux aujourd’hui reprennent un thème spécifique et le mettent vraiment bien en œuvre. Douse expose alors son point de vue et explique pourquoi personne ne maîtrise vraiment plus l’art dans l’industrie triple A :
Une grande partie du secteur est depuis si longtemps axée sur les données que, au fil des générations de talents, la capacité (institutionnelle et/ou intellectuelle) de prendre des décisions instinctives est devenue un art perdu. C’est pourquoi le secteur AAA est fasciné de manière perverse par les indépendants. Les indépendants ne disposent pas des données ; ils doivent se fier à leur instinct.
Selon Douse, cela finit par faire trébucher les grands. Ils s’accrochent à leurs données apparemment prometteuses, mais dans de nombreux cas, cela ne fonctionne pas. En effet, les données ne peuvent pas prédire l’avenir et ne montrent que ce qui fonctionne actuellement. Selon lui, il faut faire appel à son intuition pour répondre aux goûts des joueurs.
Les ensembles de données deviennent de plus en plus inutiles, car ils ne permettent de prédire ni les succès surprise ni les échecs. Et si l’on ne peut pas se fier aux données et que l’on a perdu son « instinct » institutionnel […], on se retrouve dans une impasse. Si l’on est coté en bourse, la panique s’installe. On joue la carte de la sécurité (ce qui est dangereux). Conséquence : les genres disparaissent jusqu’à ce que les indépendants fournissent de nouvelles données grâce à des succès inattendus : une attachement pervers, et ainsi de suite.
Les mots à l’épreuve
Douse est un expert du secteur et Larian a récemment démontré de manière très tangible ce qu’il est possible de réaliser sans se focaliser anxieusement sur les données. Son évaluation a donc tout à fait du poids. Cependant, il faut toujours veiller à ne pas généraliser.
Il existe des domaines dans lesquels l’industrie AAA est en difficulté, par exemple avec les spin-offs modernes de séries de jeux connues ou avec la tentative compulsive de copier un genre actuellement populaire. On le voit notamment avec le flot sans inspiration de jeux de tir d’extraction ou de battle royales, qui sont tous voués à l’échec.
Mais il existe également de grands éditeurs qui réalisent des bénéfices records grâce à cette formule. Des jeux comme EA FC (anciennement FIFA) ou Call of Duty sont sans doute trop importants pour échouer.
Il est également intéressant de noter que la pierre d’achoppement de la publication de Douse Mafia : The Old Country, qu’il a qualifié d’extrêmement réussi dans un autre article. Il s’agit certes d’un projet au budget plutôt limité, mais qui bénéficie néanmoins du soutien d’un éditeur de taille : 2K. En matière d’innovation, The Old Country n’est pas forcément un exemple positif, mais il remplit très bien sa fonction.